La disponibilité des produits en magasin ou leur livraison directement chez les particuliers repose sur l’organisation d’une chaîne logistique. Les activités logistiques se concentrent dans les entrepôts situés à la périphérie urbaine. Dans ces grandes architectures de tôles, travaillent au quotidien des milliers de personnes en charge de la préparation des commandes, de la gestion des stocks, des retours de marchandises, etc. Ces manutentionnaires de la logistique représentent aujourd’hui en France 13 % de la masse ouvrière. Afin de rendre davantage visible leurs activités, je me suis rendue dans une dizaine d’entrepôts de logistiques où sont manutentionnés des produits alimentaires, des textiles, des livres, du courrier, des colis ou encore des fournitures de bureau. Au sein de ces entrepôts, j’ai voulu montrer les gestes de ces travailleurs, leurs postures, le savoir-faire qu’ils développent sur leur poste de travail, la cadence peu régulière des flux à traiter et la spécificité des différents entrepôts photographiés. Ce que j’ai pu y voir est loin de l’image stéréotypée de l’immense entrepôt robotisé où l’individu aurait un rôle secondaire, voire d’assistance. Au contraire, ces ouvrières et ouvriers sont au centre de la chaîne logistique, dépendant du flux (souvent peu régulier) de l’arrivée des marchandises par les convoyeurs ou bien se déplaçant d’une allée à l’autre, dictée par la voix robotisée de la commande vocale. Les méthodes employées sont elles aussi très variables : certains entrepôts ne sont pas encore complètement informatisés et les manutentionnaires gèrent encore les stocks papier et stylo en main, là où d’autres sont équipés de casques pour que leur soient dictés le trajet et les gestes à effectuer. Et chaque entrepôt, chaque marchandise à manutentionner va nécessité l’apprentissage d’un savoir-faire propre que les plus anciens vont apprendre aux nouveaux arrivants afin de les rendre opérationnel au plus vite.